Coopération décentralisée

L'atlas franco haitien de la coopération décentralisée


Le cadre juridique de la coopération décentralisée en France


La coopération décentralisée regroupe l’ensemble des initiatives et actions de coopération internationale menées par une ou plusieurs collectivités territoriales françaises (régions, départements, communes) et/ou leurs groupements d’une part, et une ou plusieurs autorités territoriales étrangères et/ou leurs groupements d’autre part. 
Le terme « coopération » indique que les collectivités locales ne peuvent intervenir dans des pays étrangers qu’en relation avec des collectivités territoriales, et non de manière unilatérale, et ne le font pas dans le cadre d’accords internationaux (terme employé souvent à tort) mais d’une coopération strictement limitée aux compétences exercées par les collectivités locales dans le cadre de la loi.
Le terme «décentralisée » indique qu’il s’agit d’une coopération entre collectivités territoriales de pays différents, qui peuvent passer des conventions sans intervention de l’Etat, dans le cadre de leurs compétences et en fonction de l’intérêt local. 
Indépendante de la coopération intergouvernementale dans le choix de ses objets, de ses partenaires et dans l’intensité des relations entretenues, en vertu notamment du principe de libre administration et des principes de décentralisation, la coopération décentralisée ne peut toutefois s’affranchir du cadre institutionnel français. 
Celui-ci, déterminé notamment par les principes d’indivisibilité de la république et de souveraineté nationale dont découle l’organisation interne des pouvoirs publics, fait de l’Etat le seul sujet de droit international. L’action des autorités territoriales en matière de coopération extérieure ne peut ainsi ignorer dans ses choix les orientations que celui-ci donne à la politique étrangère de l’Etat français dans la sphère géographique ou dans le pays considéré. A cet égard, les conventions de coopération décentralisée n’ont pas statut de traité international et demeurent subordonnées aux engagements internationaux de la France de toute nature.
Champ d’application
La coopération décentralisée a un champ d’application très large : elle peut se limiter à de simples relations d’amitié (jumelages) ou à de simples déclarations d’intention dans certains domaines (par exemple en matière d’échanges culturels ou de relations entre acteurs économiques). 
Mais elle peut également avoir pour objet :
- des actions d’aide technique au développement ;
- des actions d’aide à la reconstruction, matérielle ou administrative, après un conflit armé ou après une catastrophe naturelle ;
- des actions d’aide à la création ou à la reconstruction de services publics locaux, efficaces ou à la mise en place d’une organisation locale démocratique ;
- des actions d’échanges ou de partenariats économiques visant à créer des débouchés pour les entreprises locales ;
- la réalisation en commun d’actions et d’opérations nécessaires au développement économique ou à l’aménagement de l’espace que forment ensemble les collectivités ou groupements de collectivités dans les zones frontalières ;
- la gestion commune de biens ou de services publics dans les zones frontalières également.
La coopération transfrontalière constitue l’une des modalités les plus abouties de la coopération décentralisée. Dans ce cadre, les collectivités françaises ou leurs groupements peuvent coopérer au sein d’organismes dotés de la personnalité juridique, de droit français ou étranger, la coopération consistant alors en la mise en commun de services et d’équipements pour la réalisation de projets de développement économique et d’aménagement de l’espace.
Historique
Les premières formes de coopération décentralisée sont apparues après la Seconde Guerre mondiale sous forme de jumelages.
La loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions a reconnu officiellement le droit pour les conseils régionaux de nouer des relations avec des collectivités étrangères. Cette possibilité était donc soumise à l’autorisation du Gouvernement.
C’est la « convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales », élaborée à l’initiative du Conseil de l’Europe et ouverte à la signature à Madrid le 21 mai 1980, signée et ratifiée par la France (1984,1989, levée des réserves en 1995), qui a posé les bases de la coopération transfrontalière. Cette convention a été complétée et précisée par un protocole additionnel du 9 novembre 1995, également signé et ratifié par la France (2000) qui prévoit notamment la possibilité de créer des organismes de coopération transfrontalière. Un protocole n°2 relatif à la coopération interterritoriale a été ratifié le 5 mars 2007.
Les lois du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République et du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire sont venues organiser juridiquement le champ de la coopération décentralisée par l’introduction dans le CGCT d’un chapitre spécifique. 
Ces dispositions ont été depuis modifiées (loi du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et de développement durable du territoire, loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et loi du 2 février 2007 relative à l'action extérieure des collectivités territoriales et de leurs groupements) et complétées par des accords internationaux avec les Etats frontaliers.

Les textes du Conseil de l’Europe n’étaient pas forcément ratifiés par nos voisins ou l’étaient avec une réserve sur la nécessité d’accord préalable de l’Etat, ce qui explique le développement d’une série d’accords avec nos voisins :
- l’accord franco-italien de Rome du 26 novembre 1993 ;
- l’accord franco-espagnol de Bayonne du 10 mars 1995 ;
- l’accord franco-germano-helvético-luxembourgeois de Karlsruhe du 23 janvier 1996 ;
- l’accord franco-belge du 18 avril 2002. (entré en vigueur le 1er juillet 2005).
Evolution du droit de la coopération décentralisée
Le droit de la coopération décentralisée a connu deux avancées récentes :
• La loi du 2 février 2007 relative à l’action extérieure des collectivités locales
La base légale des actions de coopération de coopération décentralisée avec les pays du Sud avait été fragilisée par deux jugements récents (TA Poitiers du 18 novembre 2004 et TA de Cergy-Pontoise du 25 novembre 2004) venus donner une interprétation restrictive à la notion d’intérêt local ; ces décisions tendaient à remettre en cause la régularité de nombreuses actions conduites par les collectivités locales.
Une proposition de loi (dite « loi Thiollière ») a été votée le 2 février 2007 avec l’aval du gouvernement, afin de sécuriser l’action de coopération décentralisée des collectivités territoriales en autorisant explicitement ces dernières à mener des actions d’aide au développement sans être limitées par leur domaine de compétences.
Ces dispositions ont été codifiées au sein de l’article L 1115-1 du CGCT.
• Le règlement communautaire du 5 juillet 2006 relatif à la création d’un groupement européen de coopération territoriale
Ce nouvel instrument, doté de la personnalité juridique et soumis aux règles de droit de l’Etat dans lequel il aura son siège, permet d’offrir une structure propice à l’émergence de nouveaux projets de coopération entre collectivités territoriales et au développement de coopérations existantes sur le territoire de l’Union européenne. Il convient de souligner également que ce règlement, qui n’est pas limitée à la seule coopération transfrontalière, prévoit une participation possible des Etats membres aux GECT, ce qui constitue une dérogation au principe actuellement posé par l’article L 1115-5 du CGCT.